Sexus Electoralus
ou l’histoire de ma rencontre avec celle qui chaque soir, tient et soupèse les bourses de la République.
Elle semblait nerveuse et quelque peu colérique. Plus rien n’allait entre elle et le président. Des promesses datant de cinq ans, non tenues, l’opacité dans la vie amoureuse de l’homme et, récemment, le stress pré-électoral qui mit à mal le climat dans le couple.
Tout commença, me confia-t-elle, par une affaire de réformes. Des réformes dans les relations entre elle et le président. Elle demandait plus d’argent, plus d’amour, plus de fidélité. Tout un programme ! Le Président, après plusieurs projets de réformes avortés et moult négociations, lui aurait promis que ce serait fait. Mais après les élections.
Seulement, ce dernier ne se doutait pas une seule seconde qu’elle l’attendait au tournant.
Un soir, raconte-t-elle, il arrive dans sa chambre avec des beaux discours-programme, des mots doux, des belles paroles, des promesses de campagne.
«Il me disait que j’étais belle comme le nouveau pont TP3–Agoe. Ah bon ? avais-je rétorqué. Si c’est comme ça, faut donner de l’argent de péage, sinon, tu passeras pas sur le pont, tchrrrrrouuuuu.
Il pensait avoir mon opinion favorable pour ce qu’il voulait faire. Ses mains baladeuses allaient et venaient sur moi. Il me dit qu’il avait l’impression de caresser le corps électoral, parfois s’attardant plus sur la broussaille noire finement taillée de la campagne. Je devenais folle. Devais-je céder ? Une véritable Commission paritaire de suivi se déroulait dans ma tête. Un référendum où je devrais dire si oui ou non je le laisserais glisser son bulletin dans mon urne. Il se déshabillait déjà. Un parfum de victoire lui titillait les narines.
Pour le distraire, je lui demandais pourquoi il voulait faire ériger un monument à son nom en pleine campagne. Une érection monumentale, c’est toujours bon pour bien pénétrer l’électorat non ? me répondit-il. Il scruta mon corps de façon uninominale à un tour, puis à deux tours. La tendance dans ses dessous me confirma ses intentions. Au moment où il voulut élire domicile dans mon fief, je l’écartai violemment et m’éloignai précipitamment ; le laissant seul dans l’isoloir de ses pensées. Après les élections chéri, lui lançai-je. Ce soir tu ne bourreras pas mon urne ; elle est déjà scellée ; j’ai voté Abstention. Non, dans ton cas, c’est plutôt une abstinence, fit-il en souriant. Voilà comment j’ai décidé d’observer une période transitoire dans nos relations.
Seulement, fit-elle avec une pointe de regret dans son regard, « je ne veux l’alterner avec personne d’autre. Et si ça continue je risque de ressentir un vide constitutionnel ».
C’est à ce moment-là que le président fit irruption dans la salle où se déroulait l’entretien. Elle fit les présentations :
« Monsieur le Président, Salaud Lumineux, petit blogueur à ses heures perdues.
Salaud Lumineux, mon chéri le Président.»
Le président, pourtant réputé pas très bavard, me dit :
« Ne l’écoutez pas hein. Nous, les hommes politiques, tout va bien dans nos couples jusqu’à ce qu’au moment d’un petit problème d’élection.
– Vous voulez dire d’érection Monsieur le Président ? »
L’homme sourit en marmonnant entre ses dents un « Salaud ».
« Lumineux, Monsieur le Président. Lumineux, lui avais-je précisé.
– J’espère qu’il n’y a jamais eu rien entre vous et ma future femme, me fit-il.
– Oh non, je n’oserais point Monsieur le Président. Sinon, comme le disent les militaires, nous risquerions de servir dans le même corps.»
Sur ce, il se leva avec sa maîtresse, signifiant la fin de l’entretien. Il semblait perdu dans ses pensées illusoires, voire isoloires. Les troubles de l’érection, pardon, de l’élection, préoccupent les chefs d’Etat. La déprime post-électorale se prépare à gagner le coeur des populations.
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